Loading Spinner
Don’t miss out on items like this!

Sign up to get notified when similar items are available.

Lot 4: Lettre autographe à son neveu, l'abbé Bossuet de Savigny, à Rome. Datée « à Versailles, 24 fév[rier] 1698 ». , Bossuet, Jacques Bénigne

Est: €13,000 EUR - €18,000 EURSold:
Sotheby'sParis, FranceDecember 16, 2008

Item Overview

Description

8 pages in-8 (208 x 157 mm), à l'encre brune sur deux doubles feuillets de papier vergé filigrané, montés ensemble par un cachet de cire. Excellent état (minimes marques et salissures).

Artist or Maker

Literature

Cette lettre a été publiée dans les AEuvres complètes de Bossuet, tome XVIII, Lettres de piété et de direction, lettres sur l'affaire du quiétisme, Besançon, 1841 (p. 77-79). Elle figure, non chiffrée, dans la Correspondance de Bossuet, 1915, Tome IX, nov. 1697-juin 1698, lettre 1649, p. 186-191. Une intéressante variante de ces informations peut être lue dans la lettre d'Antoine Bossuet, père de l'abbé Bossuet, datée du 18 février 1697, dans Revue Bossuet, oeuvres inédites, documents et bibliographie, 1905, Slatkine Reprints, 1968, p. 122.

Notes

En grande partie chiffrée, cette longue et passionnante lettre se rapporte entièrement à l'opposition virulente de Bossuet à l'archevêque de Cambrai, Fénelon, lors de la célèbre querelle du quiétisme, quelques jours après la parution de l'Explication des Maximes des Saints.
Bossuet relate les derniers développements de l'agitation à Versailles à son neveu, abbé à Rome, où Fénelon a décidé de porter son affaire.
La plupart des noms qui sont mentionnés dans la lettre ainsi que les mots clefs ont été remplacés par des chiffres codés. Ainsi l'expression « au Roi » est-elle chiffrée « 34 », le nom de Bossuet lui-même remplacé par « 63 », la censure par « 7.5.50.70.80.36.5 », la Cabale par « 7.9.8.9.97.5 », et le livre de Fénelon, Les Maximes des Saints, par « 55 » ; soit par des expressions, ainsi : Fénelon est-il figuré par « Instruction pastorale » ; Monseigneur de Paris par « St Anselme » ; le roi par « Carafe » ou « Carafa » et le cardinal Albani par « le cheval »... Le destinataire a rétabli au-dessus de certains chiffres les lettres formant les mots ou les noms correspondants.

« J'ay receu votre lettre du 4. Je suis bien aise d'apprendre que votre santé se conserve parmi tant de travail.
La nomination des deux cardinaux pour présider aux assemblées, ne peut faire que beaucoup de bien. Je concerterai aujourd'hui avec M. de P. [Noailles, archevêque de Paris] ce que nous aurons à leur écrire. 63 [Je] rend bon compte à 34 [au Roi] de tout ce qu'écrit 32 et 31[vous et M. Phelippeaux m'écrivez]. L'esprit mesme de Diomède [cardinal Noris] est 61 55 [contre ce livre (Les Maximes des Saints)] et il faudroit avoir oublié St Augustin si on donnait dans ces rêveries et ces petitesses.
Loin que l'Instruction pastorale
[de M. de Cambrai] ait adouci St-Anselme [M. de Paris] et l'Elée [Godet des Marais, évèque de Chartres] sur le livre, elle les a convaincus de plus en plus qu'il est pernicieux et nécessairement censurable et non seulement nous sommes parfaitement d'accord, mais encore nous donnerons, dans l'occasion, toutes les marques possibles de notre union. Je puis vous assurer en général, que ceux qui dans cette affaire voudront faire leur cour à 24 [cardinal de Bouillon] et à 56 [aux Jésuites], la feront fort mal à Carafe [au Roi] et à 26 [Madame de Maintenon], qui ne conservent les dehors avec quelques-uns de 7.9.8.9.97.5 [la cabale], qu'en attendant la 7.5.50.70.80.36.5 [censure], après laquelle on verra 13 + 7.2.9.50.3.5.4.5.50.71 [le changement].
Les bruits qu'on répand ici contre vous, ne sont rien moins 8 + 80.50.5.504.9.50.71 [qu'un enfant]; ce qui a donné lieu au Pape de vous éloigner de Rome [l'abbé Bossuet était accusé de mener à Rome une vie scandaleuse], et de faire demander justice au Roi par le nonce, ce qui ne se trouvant pas avoir la moindre vraisemblance, c'est la justification de votre conduite. Cependant 32 [vous] voit bien qu'il ne saurait trop se rendre, en toutes manières, irrépréhensible 63+4.9.99.71, 71.72.80.72, 36.5.64.9.36.29.8.5.36 [fait-on remarquer](...)
Vous pouvez être assuré d'une parfaite union de St-Anselme [M. de Paris] et l'Elée [de M. de Chartres] avec moy ; et si l'on ne craignoit, dans la conjoncture présente, de trop émouvoir les évesques, on en feroit paroître cinquante lettres. La vérité est, que si Rome ne fait quelque chose digne d'elle, et les cardinaux de leur réputation, ce sera un scandale épouvantable, qui ferait tort à la religion.
Il faut qu'on ait écrit quelque chose à M. de C.
[M. de Cambrai] de Rome sur l'accommodement, puisque M de C. a tant écrit contre à M. le nonce, comme vous l'aurez vu par ma précédente. Il n'y a point d'accommodement dans une affaire de religion : la vérité veut être nette victorieuse; et tout ce qui biaise a toujours été rejeté. (...)
Votre travail sur 55 [livre de M. de Cambrai] sera grand, mais très-utile. Le cheval [cardinal Albani] se perdra ici de réputation, par ses complaisances pour l'abbé Feliciano [le cardinal de Bouillon]. Les accommodemens rendront ridicules tous ceux qui les proposeront.
(...) Vous aurez bientôt toute ma réponse à M. de Cambray. Je vous envoie une lettre pour joindre à ce livre, quand vous le rendrez à M. le cardinal Spada, pour le Pape et pour lui. Je dis un mot, dans ma lettre, du tort qu'on fait aux vrais spirituels, de les alléguer pour M. de Cambray.
Vous aurez bientôt à Rome le provincial de France des Carmes-Déchaussés, qui est ami de son général, bien instruit ici, et qui est persuadé que SteThérèse et le bh
[bienheureux] Jean de la Croix sont bien éloignés de ce prélat, et qu'on leur a fait injure de les alleguer. Je ferai sur cela un petit écrit latin, où je joindrai saint François de Sales.
Ayez bon courage : ne vous rebutez point; c'est le moyen de venir à bout de tout.
(...)
J'espère présenter mon livre au Roy demain ou après. Le latin suivra bientôt contre la réponse au Summa. Nous nous portons a merveille dieu merci.
Attendez-vous à voir votre prétendue affaire dans la gazette de Hollande : M, de Cambray y fait dire tout ce qu'il veut par 2.9.36.97.9.99
[M. de Harlay]. » (...) Cette extraordinaire lettre codée de Bossuet montre combien profond fut l'effroi de l'Aigle de Meaux et tacticienne son attitude face à la fameuse controverse sur le quiétisme qui fut la grande affaire des dernières années de sa vie. Bossuet se déchaîna contre le mysticisme de la doctrine du « pur amour » professée en France par Mme Guyon et soutenue par Fénelon, l'archevêque de Cambrai et n'hésite pas à utiliser son neveu, l'abbé Bossuet (1664-1743) en service à Rome auprès du Pape. Il en fait l'espion des coulisses de la papauté, et met au point avec lui cette correspondance codée dans laquelle on perçoit bien qu'il avance, masqué, dans une bataille sans merci, où le roi même est une sorte de "pion". L'ouvrage avait d'abord suscité une réplique violente de Bossuet qui exigea la rétractation de Fénelon. Devant le refus de celui-ci et la publication de son Explication des maximes des saints sur la vie intérieure, où sa position, légèrement atténuée, n'entamait nullement sa foi quiétiste, Bossuet remua toute l'Église française ainsi que le Vatican pour obtenir sa condamnation.
Comme on le voit dans la présente lettre, Bossuet ne s'attaqua pas seulement aux idées développées par Fénelon, mais s'employa également à le discréditer personellement auprès du Roi et de Mme de Maintenon, politique couronnée de succès qui mena en 1699 à son éloignement de la cour et à sa condamnation à Rome. On voit ici Bossuet accueillir favorablement la nouvelle de la nomination de deux nouveaux cardinaux acquis à son point de vue, particulièrement le cardinal Noris qui était profondément opposé au livre de Fénelon. Il évoque également les derniers sermons de carême que vient de faire Fénelon et qui ont convaincu les cardinaux de Paris et de Chartres. Les termes « pernicieux » et « nécessairement censurable » sont ici d'une extrême violence, tout comme la formule qu'il emploie : « Il n'y a point d'accommodement dans une affaire de religion », rappelant combien l'intolérance religieuse fut puissante, d'autant plus quand elle était professée par ses plus remarquables esprits comme Bossuet.

Auction Details

Books and Manuscripts

by
Sotheby's
December 16, 2008, 12:00 PM CET

76, Rue du Faubourg Saint-Honoré CS 10010, Paris, Il-De-France, 75384, FR