Lot 20: EXCEPTIONNELLE TABLE-CONSOLE « MAÇONNIQUE » PROVENANT PROBABLEMENT DU COMTE D'ARTOIS Attribuée à Georges JACOB (1739-1814) Reçu Maître Ebéniste en 1765 Epoque Louis XVI, vers 1780

EXCEPTIONNELLE TABLE-CONSOLE « MAÇONNIQUE »
PROVENANT PROBABLEMENT DU COMTE D'ARTOIS
Attribuée à Georges JACOB (1739-1814)
Reçu Maître Ebéniste en 1765
Epoque Louis XVI, vers 1780
Matériaux
Bois doré, traces de polychromie et d'argenture, marbre de Carrare
Plusieurs étiquettes anciennes, l'une avec un numéro 9184, inscrit à l'encre
H. 95,5 cm, L. 114 cm, P. 56,5 cm
€ 200 000 - 250 000

Exposition Cette aeuvre fut présentée lors de l'exposition De Versailles à Paris, le destin des collections royales, Mairie du Ve arrondissement, Paris, septembre-décembre 1989,
décrite et reproduite au n° 60, pl. 12
Cette rare table-console repose sur un piétement composé de six montants, dont quatre à enroulement et double jambage. La ceinture en berceau présente cinq réserves à fond amati, décorées de motifs maçonniques dans des encadrements de palmettes. Au centre sont sculptées deux branches d'acacia enrubannées à sept rameaux chacune. Sur les côtés, de droite à gauche : une équerre et un compas avec un rameau d'acacia, une épée et une faux, un sceptre et un fléau, une truelle et une règle. Sur le pourtour se déploie une guirlande de feuilles de chêne et de glands, à rubans et passementeries retenus par des anneaux. Les pieds à double griffe sont reliés par une entretoise à terrasse centrale ornée d'un culot feuillagé. Celle-ci est dominée par un motif polychrome à colonne coiffée d'un casque empanaché et lauré avec, au pied, un lion couché portant des traces d'argenture. Ce motif n'est pas sans rappeler la paire de chenets conservée au Metropolitan Museum où un casque et une cuirasse sont disposés au sommet d'une colonne tronqué. Des analogies stylistiques et techniques étroites
s'observent entre notre meuble et la table console «aux sirènes» du
Musée du Louvre livrée en 1781 par Georges Jacob pour le Cabinet
Turc du Comte d'Artois à Versailles. Il s'agit en premier lieu de détails de réalisation : épaisseur identique des traverses de la ceinture, similitude des montages, choix des montants à double jambage, amatis très particuliers dans les compartiments en ceinture, traitement des emblèmes et de la passementerie. Par ailleurs, le thème à caractère militaire est fréquent dans les décors réalisés pour le Comte d'Artois. On peut notamment citer les projets de Bélanger pour la chambre à coucher du Château de Bagatelle et les encoignures de Joubert livrées pour Versailles aujourd'hui à la Wallace Collection. La présence d'emblèmes maçonniques est inédite ; on sait cependant que le Comte d'Artois avait été initié à la franc-maçonnerie par le duc de Chartres ; il aurait été Grand-Maître de la loge des Trois-Frères à Versailles. Le Prince était également Grand Prieur de l'Ordre de Saint-Jean de Jérusalem, dont la résidence officielle était le Palais du Temple. Les sept rameaux d'acacia ornant la réserve centrale sont caractéristiques des décors de Maîtres, le sept étant réservé à ce grade ; ils évoquent les rameaux d'acacia du cénotaphe de Hiram, figure biblique au caeur de la légende du troisième grade. Frère cadet
de Louis XVI, le comte d'Artois (1757-1836), futur Charles X sous la
Restauration (1824-1830), instaura vers 1780 un goût pseudo-oriental
mêlé de néo-classicisme, de style anglais et de thèmes militaires.
Les ameublements commandés à cette époque pour les différentes
résidences du Prince étaient dessinés par son architecte en chef,
François-Joseph Bélanger, lequel conçut et dirigea les travaux de
Bagatelle. Pour les meubles de menuiserie, il fit souvent appel à
Georges Jacob ; Jean-Baptiste Rode en exécutait la sculpture tandis
que Ramier était chargé de la dorure et du décor peint. Notre table
console est l'aeuvre probable de ces trois maîtres.

Références bibliographiques :
Collectif sous la direction de Charles Jacques, De Versailles à Paris, le destin des collections royales, catalogue de l'exposition de la Mairie du Ve arrondissement, éd. Centre Culturel du Panthéon, Paris, 1989
Bill G. B. Pallot, Le mobilier du Musée du Louvre, tome 2, éd. Faton, Dijon, 1993, pp. 132-137
Daniel Alcouffe, « Les objets Artois au Louvre », in La Folie d'Artois, éd. Antiquaires à Paris, 1988, pp. 158-165
Delphine Lamazou, Le Mobilier du comte d'Artois entre 1757 et 1789, Université Paris IV, 1999